Conférence « Napoléon 1er et la science ».
C’est un auditoire bien studieux qui, ce 9 janvier, a pu dans certains cas apprendre, dans d’autres cas réviser, certaines grandes notions scientifiques en mathématiques, en physique et ceci dans le contexte historique retracé par Jean-Jacques Laboisse, Professeur à l’ENS Paris-Saclay. Il nous a fait l’amitié de répondre à notre invitation, sur le thème « Napoléon 1er et la science ». Historiens amateurs, scientifiques modestes ou confirmés... nous étions tout ouïe... Ce fut passionnant !
« Si je n’étais pas devenu général en chef… je me serais jeté dans l’étude des sciences exactes » parole de celui qui était Napoléon Bonaparte, général de la 1ère République, nommé par Robespierre. Il n’était pas encore Premier Consul et encore moins Empereur. Excellent mathématicien (ce qui est indéniablement une grande qualité…) mais plus généralement « doté d’une véritable passion scientifique » selon son contemporain Geoffroy de Saint Hilaire. C’est sans surprise qu’on le voit élu à l’Institut National, Section II Arts mécaniques, même s’il a été quelque peu « pistonné ». Le général Bonaparte fera tout de même de cet institut un instrument politique à son service.
C’est bien entendu à l'occasion de la Campagne d’Égypte en 1798, avec ses 160 scientifiques embarqués, que l’intérêt de Bonaparte pour les sciences éclate. C'est peu dire que l'expédition obtient de piètres résultats sur le plan militaire, mais le bilan scientifique est impressionnant. Jean-Jacques Laboisse évoque quelques-uns des savants qui à cette occasion ou en d’autres lieux ont croisé la route du Premier Consul puis Empereur, pour leurs travaux dans ce qu’on appellerait aujourd’hui la recherche fondamentale ou dans les sciences appliquées. Un peu anecdotique, en 1797, le rapport de Bonaparte sur le « chariot à feu » (ou « fardier de Cugnot » du nom de l’inventeur) : la machine à vapeut fait là ses premiers mètres (voir dessin ci-dessous).
Plus décisif : le réseau de « télégraphes Chappe » développé par Bonaparte après le Coup d’État du 18 Brumaire et sous l’Empre. Le conférencier nous en explique les principes : le régulateur (grande barre) est muni des deux petites ailes dont les combinaisons de positions donnent 92 signaux possibles ouvrant la voie à 92 x 92 = 8464 mots de vocabulaire consignés dans un livret possédé par chaque opérateur. Cent fois plus que nécessaire aux tweets de tel Président d’Outre-Atlantique : l’Histoire n’avance pas toujours dans le bon sens…
Le conférencier évoque ensuite les Monge, Berthollet, Chladni, Laplace, Fourier, Chaptal, Volta (Napoléon a voulu aussi soutenir des savants étrangers), une femme savante (pas au sens de Molère !) telle Sophie Germain, mathématicienne (théorème de Germain !) et physicienne, d'autres encore. Disons-le : cela a remis en mémoire, pour certains d’entre nous, quelques sueurs froides estudiantines quasi cinquantenaires : ah ! l’équation de la chaleur, oh ! les séries de Fourier, oui, la conjecture de Fermat (la fameuse équation xn + yn = zn pour nombres entiers), les probabilités… entre autres souvenirs plus ou moins cuisants !
« Il eût été plus de mon goût de marcher sur les traces de Newton ! ». À Lagrange qui avait écrit à ce propos, imprudent : « Nul n’atteindra à la gloire de Newton, il n’y avait qu’un monde à découvrir ! » Bonaparte rétorque « Qu’ai-je là entendu ? Mais le Monde des détails ! Qui a jamais songé à cet autre ? »
Vibrations sonores et figures de Chladni |
Un grand merci à Jean-Jacques Laboisse pour cet éclairage tout à fait intéressant sur notre Histoire politico-scientifique !
Prochaines conférences à partir de février : dans notre prochaine lettre-info !
CR de François GENEVAUX
Pour ceux que cela intéresse : Chladni est un des fondateurs de l'acoustique moderne.Les figures de Chladni sont obtenues en faisant vibrer une plaque de cuivre avec un archet. Une vidéo sur le sujet (3 min) https://www.youtube.com/watch?v=6kLmlbkWJZ8